Vers un retour en grâce des locaux commerciaux de centre-ville ?
Dans son étude Digest France 2023 le spécialiste Codata a passé au crible 4.000 sites commerciaux représentant plus de 300.000 emplacements à travers l'Hexagone. Il en ressort que la moyenne nationale du taux de vacance des pieds d'immeubles (incluant les boutiques de centres-villes) est de 9,11% en 2022 après avoir connu un pic à 9,94% en 2020.
Quand on regarde dans le détail le taux de vacance par région, la bonne dynamique est surtout du côté de l'ouest de la France (taux de vacance à 8,34% en Bretagne, 7,47% dans les Pays de la Loire et 7,03% en Normandie) et de Paris et l'Ile-de-France où le taux de vacance tombe à 6,82% !
Le high street retail redémarre à Paris et dans les grandes villes régionales
Dans le cas de la capitale, il y a évidemment toujours des disparités avec des locaux et des boutiques vides dans certains secteurs mais la tendance est positive, notamment sur quelques rues emblématiques au premier rang desquelles l'avenue des Champs-Elysées qui a enregistré plusieurs prises à bail marquantes (Adidas, les montres de luxe Panerai, la joaillerie Messika, les vêtements de sport Lululemon...). A Paris et dans les métropoles régionales comme Lyon, Toulouse, Bordeaux, Lille, Marseille ou Rennes, les valeurs locatives reprennent des couleurs dans plusieurs rues (après des décotes de 10% à 30% pendant le Covid) et nombreux sont les spécialistes qui voient là un retour en grâce du 'high street retail' qui se positionne sur les top emplacements n°1 en hypercentre et zones piétonnes très denses.
Autre signal positif, certaines enseignes comme Darty ou Décathlon réinvestissent les centres-villes avec des formats adaptés aux surfaces moyennes.
Il y a enfin clairement eu un effet d'opportunité pour certaines enseignes bien capitalisées qui ont profité des emplacements libres et du réajustement des loyers pour renforcer leur maillage et prendre des positions sur les meilleurs axes de la capitale et des grandes villes régionales.
Offre et vacance des locaux commerciaux dans les villes moyennes
Ce redémarrage des centres-villes à Paris et dans les métropoles régionales trouve-t-il un écho dans les villes moyennes et petites ? Entre attentisme pour les villes moyennes et inquiétudes pour les plus petites villes, la réponse est plus mitigée.
Quand on interroge Estelle SEGURET de l'agence Arthur Loyd de Blois au sujet de son marché, elle note une vacance persistante sur les grandes surfaces en centre-ville et les difficultés du prêt-à-porter se font sentir dans l'hypercentre qui concentre de nombreuses enseignes et indépendants spécialisés dans l'équipement de la personne. Des nouveaux concepts arrivent et le centre-ville bénéficie du dispositif Action Coeur de Ville pour le dynamiser mais le marché des pieds d'immeubles tourne pour le moment au ralenti, une situation qu'on retrouve dans nombre de villes moyennes.
Quand on descend encore en taille de ville pour rentrer dans le périmètre des Petites Villes de Demain, ces communes rurales de moins de 20.000 habitants soutenues par l'Agence Nationale de la Cohésion des Territoires pour renforcer leur attractivité commerciale, la vacance commerciale semble revêtir un caractère quasi-systémique.
Quelles solutions à la perte d'attractivité commerciale des petites villes ?
Quand Le Monde consacre un article au cas de Vaucouleurs dans la Meuse, il éclaire le cas de ces 'Petites Villes de Demain' en perte de vitesse où le centre-ville a été déserté par les habitants, où de nombreux logements demeurent vacants et où beaucoup de commerces, emportés par la crise, ont tiré le rideau sans que les bailleurs, peu concernés ou englués dans des indivisions conflictuelles, ne s'en émeuvent.
Faisons ici le lien avec le travail mené en Loir-et-Cher (41) par l'OET Observatoire Economique des Territoires qui dans sa Publication n°167 (Fiches de l'Observatoire Mai 2022) mène une analyse très fine sur 17 petites communes du département pour tenter de comprendre les causes de la vacance commerciale.
Il en ressort que la perte de vitalité commerciale est pour partie liée à la démographie, la vacance étant élevée là où le déclin démographique s'inscrit dans un temps long, mais cela n'explique pas tout. Dans sa synthèse l'OET note que la situation de chaque PVD est unique et voit sa vacance déterminée par une combinaison à chaque fois différente de facteurs tels que la fréquentation de passage, la dynamique économique et touristique, les équipements ou encore le volontarisme des municipalités et celui des commerçants.
Au-delà du mantra selon lequel le commerce va là où il y a des flux et que pour redynamiser les coeurs de villes, il faut (ré)générer des flux et convaincre la population d'y (re)venir, l'analyse de l'OET démontre que la vacance commerciale dans les petites villes est multifactorielle et appelle à des traitements différenciés.